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Les Elfes du Dauriath

Dimah et Djindjinah

Par Yichard Muni, barde Elfe

 

Rencontrons-nous en vrai! Mon nom: Richard Trigaux. Nom d'artiste: Yichard Muni
Tous les vendredis à 12pm SLT (Heure de Californie, PT ou PDT) (France: 21h), rencontres elfiques et histoires

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Ce texte s'insère dans une intrigue plus vaste. Il vaut donc mieux lire d'abord «Le Baiser des Mondes».

Index des histoires: ordre chronologique, ou par ordre de création

 

 

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Musique de fond pour cette histoire: Prélude à l'après-midi d'un faune, Debussy.

Après sept siècles d'exil dans le Dauriath, le Monde dans le Ciel, il ne restait plus que quelques années avant le «retour des Elfes» dans le monde des Humains, le Nyidiath. Mais les Elfes du Dauriath avaient aménagé leur monde en un merveilleux paradis de forêts et de fleurs, où ils étaient heureux et en sécurité. Ils n'avaient donc aucune envie ni aucun projet de retourner dans le monde des humains, et d'y connaître à nouveau la haine et la répression. De plus, il y avait des rumeurs selon lesquelles les Humains avaient détruit une grande partie de la nature, rendant leur monde Nyidiath désagréable. Ainsi, le «retour des Elfes» était considéré comme une métaphore, signifiant le retour de la sagesse et de la bonté dans le monde des Humains. Mais la plupart des simples Elfes n'avaient aucune idée de la manière dont cela se ferait.

En fait, cet événement se produirait lorsque le passage du Horiathon entre les deux mondes s'ouvrirait à nouveau. Pour l'instant, un puissant mascaret, s'inversant selon les marées, interdisait le passage à tous les bateaux. Mais ce mascaret diminuait rapidement, ce qui allait permettre aux bateaux de passer dans les deux sens. Le Conseil des Elfes savait depuis longtemps que cela arriverait, d'où la prophétie. En fait, il ne s'agissait pas d'une prophétie, mais d'une prédiction astronomique, vérifiée avec de plus en plus de précision au fur et à mesure que le moment approchait. Mais ils savaient aussi depuis longtemps ce que la réouverture du Horiathon signifierait en réalité: les gouvernements humains tenteraient d'envahir le Dauriath dès qu'ils le pourraient, pour soulager leur monde surpeuplé et pollué. Et surpeupler et polluer le Dauriath à son tour, en seulement vingt ans.

Si bien que le Conseil elfique s'était préparé à cet événement. La plupart d'entre eux se rappelaient encore douloureusement de la répression des Elfes et des horreurs de l'Exode. Plusieurs fois dans l'Histoire, les Elfes avaient été contraints de fuir, en raison de leur infériorité technique. Si bien qu'ils avaient décidé que cela ne se reproduirait plus.

Et ils ont eu sept siècles pour se préparer.

Mais ces préparatifs se faisaient surtout dans le secret, dans l'endroit le plus éloigné du Dauriath, l'Arlit, l'endroit que l'on ne peut pas voir depuis le Nyidiath. Dans les autres lieux visibles depuis le Nyidiath, l'Undar, les Elfes avaient repris leur ancienne façon de vivre en harmonie avec la nature, comme ils le faisaient dans leurs anciens lieux et îles elfiques du Nyidiath, avant l'Exode. Cette séparation géométrique était en fait très pratique, l'Arlit cachant les moyens, tandis que l'Undar affichait clairement le but.

Pour la plupart des Elfes de l'Undar, nés après l'Exode, le fait de devoir se préparer à repousser une invasion était un concept assez abstrait. Ils vivaient simplement heureux, apparemment inutiles à la construction d'une force armée. Mais cette séparation était utile même dans ce but. En vivant heureux et en méditant, ils jouaient un rôle très important, qu'aucune arme ne peut accomplir: restaurer la merveilleuse magie des Elfes. Avant l'Exode, leur dieu MakTar avait retiré sa protection magique, afin de forcer les Elfes à accepter l'Exode. Il savait que cette magie ne serait pas assez puissante pour protéger les Elfes d'une extermination planifiée à l'échelle mondiale. Mais aujourd'hui, cette magie a été entièrement reconstruite, et elle est bien plus puissante qu'auparavant. Elle est aussi plus profonde et plus subtile, afin de résister également à la terrible force destructrice du matérialisme et du prosaïsme.

En parlant de magie, on pense à des magiciens, des personnages puissants maniant des pouvoirs spirituels obéissant à leur volonté. En fait, cette vision est totalement irréaliste. C'est pourquoi nous ne la voyons jamais dans la réalité! La magie, c'est quand la conscience interagit avec le monde physique, comme si ce monde était la visualisation de cette conscience. En changeant la visualisation, on peut alors changer le monde physique... parfois. Une excellente métaphore est celle d'un champ quantique: lorsqu'il est faible, il n'a aucun effet. Mais plus il est fort, plus il produira d'événements quantiques. Mais il s'agit toujours d'événements aléatoires et imprévisibles. Il en va de même pour la magie: lorsqu'elle est suffisamment forte, elle se met à produire des événements imprévus, comme des messages dans les rêves, une compréhension soudaine ou des changements inattendus qui poussent dans la bonne direction. Même lorsque rien de tout cela ne se produit, une magie plus faible peut encore provoquer des biais subtils dans la façon dont les choses se déroulent. Mais toute tentative de l'égo de maîtriser ou de contrôler la magie l'arrête immédiatement! La raison en est très simple: l'égo naît du cerveau. Et comme le cerveau est un objet matériel, il est lié aux lois de la physique, de sorte que l'égo ne peut avoir aucun effet direct sur le monde. Seule la conscience le peut... si elle parvient à avoir ses propres activités et son propre contenu, au lieu de s'agripper frénétiquement au contenu du cerveau. Mais seules de nombreuses années de méditation peuvent libérer la conscience de cette puissante saisie innée. C'est pourquoi la magie est si difficile, voire impossible, dans une société matérialiste où la conscience est systématiquement brimée, où nous sommes constamment dérangés par les bavards, des télévisions, le bruit, et toutes sortes de personnes qui gesticulent et sautillent autour de nous pour essayer de nous voler notre énergie ou d'attirer notre attention. Il existe cependant des moyens de contourner ce problème.

Dans les temps anciens, avant l'Exode, les Elfes disposaient d'une puissante magie défensive. Les envahisseurs osaient rarement pénétrer sur les terres elfiques, et les survivants rapportaient toutes sortes d'événements inexplicables et terrifiants: cris nocturnes à rendre fou, pierres volantes fracassant leurs visages, lianes étrangleuses, animaux pacifiques devenant enragés, abîmes s'ouvrant sous leurs pieds, fléchettes jaillissant de nulle part, et bien d'autres histoires horribles.

Cette magie fonctionnait bien sur des ennemis ignorants et superstitieux, qui craignaient la nature et ses forces cachées. Cependant, quelque temps avant l'Exode, avec la diffusion des valeurs matérialistes, cette peur s'est atténuée. Les armes à feu donnaient aux envahisseurs la sensation d'être invincibles: «Les balles volent plus vite que la magie», disaient-ils. Si bien que ces envahisseurs ont facilement pris le dessus sur la magie elfique, simplement en bavardant sans cesse, en braillant des chansons vulgaires, en répandant des ordures, en amenant des femmes pornos, etc. Ils ont fait exactement ce que l'on voit trop souvent sur Terre: un simple touriste bavard laisse derrière lui une traînée de blessures subtiles dans l'ambiance de la nature, tout comme un char d'assaut laisse un sillage d'arbres et de plantes écrasées. Cela suffit pour que la magie ancienne disparaisse, et même pour que des lieux extraordinaires deviennent banaux, simplement avec le bruit des voitures, ou lorsqu'un touriste obèse et arrogant y jette un regard méprisant. Vous savez donc maintenant pourquoi la magie «n'existe pas», pourquoi d'anciens lieux puissants admirés pendant des millénaires sont aujourd'hui de simples attractions touristiques sans aucune force. Même leur pouvoir d'inspiration a disparu, il est devenu une légende. Pour les rares qui subsistent, vous ne trouverez aucune photo, ils ne sont même pas visibles sur Google Earth.

Mais la nouvelle magie des elfes s'était adaptée aux valeurs matérialistes du monde moderne et à la pensée papillotante de ses habitants. Elle était désormais imperméable au mépris, au prosaïsme ou à la sociopathie. Même les discours des politiciens ou le rap ne pouvaient l'entraver. Elle produisait rarement des effets matériels, mais cela la rendait beaucoup plus discrète, idéale pour opérer sans attirer l'attention. De plus, la quasi-totalité des adversaires croyaient qu'elle n'existait pas. Ce qui les rendait totalement vulnérables, ne réalisant pas ce qui se passait.

Pour que cela fonctionne, les Elfes avaient besoin de l'Undar, comme d'un ballast de magie, d'une réserve de bon karma, d'un contrepoids de sérénité pendant que les soldats elfiques seraient engagés dans leurs actions. Et ils avaient besoin que cet Undar soit protégé. Ils savaient que les armées Humaines l'attaqueraient en premier, il fallait donc réagir vite, et surtout évacuer les innocents avant les attaques.

Ils savaient aussi qu'une victoire militaire, même si elle apporte un soulagement temporaire, n'est qu'une perte de bon karma, si elle n'est pas accompagnée d'une victoire spirituelle. Ils préparaient donc les deux.

Comment remporter une victoire spirituelle? En surmontant notre propre haine. Les Elfes devront respecter leurs ennemis, en tant que personnes vivantes. Leurs soldats ont été formés à la... non-violence, c'est-à-dire à ne pas apporter de haine dans le combat. Ils sont allés jusqu'à jouer à de faux prisonniers, pour apprendre à les traiter humainement.

Mais pour cela encore, ils avaient besoin de l'Undar, une force énorme de centaines de millions de personnes méditant toutes ensemble en synchronisme. Des directives avaient déjà été données, et des récepteurs radio étaient en cours de construction pour équiper toutes les maisons communautaires de l'Undar et les informer sur ce qu'il fallait méditer exactement, en temps réel.

L'Undar servait également à se protéger contre les espions. Tous devaient traverser dix mille kilomètres d'yeux aiguisés qui repéraient leur méchanceté aussi sûrement que si ils braillaient du rap. Plusieurs d'entre eux avaient déjà été arrêtés. Mais aucun n'avait encore réussi à se rendre jusqu'à l'Arlit. Cependant, les choses devaient prendre une tournure que peu d'habitants de l'Undar avaient imaginée, comme nous allons le voir dans cette histoire.

 

Dimah était un jeune Elfe né il y a une centaine d'années, dans un minuscule village de l'Undar comme des milliers d'autres. Toutes ces stratégies volaient bien au-dessus de sa tête, littéralement. Son seul souci était de vivre heureux avec sa tribu et sa merveilleuse nouvelle épouse Djindjinah.

Ce village s'appelait Iris Bleu, dans un paysage de bocage plat avec des petits champs et des vergers, entre des collines basses et boisées. C'était le printemps et, sous le soleil joyeux et le ciel bleu, les arbres fruitiers brillaient tous de blanc ou de rose, tandis que des millions de fleurs s'étalaient tout autour dans les prés et les haies. Plus loin, la forêt avait ses verts les plus tendres, et des millions de chants d'oiseaux résonnaient en d'étranges échos. Une forêt elfique n'est pas comme les nôtres: il n'y a pas de broussailles ni de ronces, et le sol est recouvert d'une mousse vert tendre, avec ici et là des plantes de sous-bois, des fleurs de l'ombre, des champignons. Une merveilleuse lumière verte tombe de la canopée d'émeraude, tandis que les rayons du soleil apportent l'or dans les clairières. Cette incroyable beauté est l'œuvre de l'égrégore et de la magie des Elfes qui vivent ici: toutes les plantes poussent harmonieusement, afin de créer cette beauté éthérée. L'influence réelle de la magie est petite, mais elle s'accumule au fil des générations de plantes et de cellules vivantes. Même les formes du sol sont influencées, puisque les plantes les contrôlent.

Autour de la maison de Dimah et Djindjinah, c'était encore mieux, avec de nombreux parterres de fleurs éparses, entre de petits murs de pierres sèches ocre faisant des coins et des recoins, abrités par des buissons et des petits arbres. Toutes sortes de plantes inhabituelles s'y épanouissaient, avec toute l'eau, le soleil et l'amour dont elles avaient besoin. L'endroit attirait tous les insectes bourdonnants et tous les papillons battant des ailes, et bien sûr les oiseaux qui gazouillaient: ils avaient des nids faits à la main et on en construisait d'autres en raison de l'affluence!

Le couple avait une maison en planches, de forme rectangulaire simple, avec un toit à deux pentes recouvert d'une couche de gazon sur une bâche. C'était l'un des nombreux nouveaux modes de vie qui apparaissaient dans le Dauriath: simplicité, petites maisons qu'ils pouvaient brûler lorsqu'elles étaient usées, et laisser la terre telle qu'ils l'avaient trouvée. Ces maisons étaient faciles à agrandir, en ajoutant des cadres, de sorte qu'elles gagnaient en longueur. D'autres bâtisses étaient en cours de construction. Ici, ils avaient leur salle de séjour, leurs réserves de nourriture, leur chambre à coucher et un atelier de couture, où ils fabriquaient des vêtements pour la communauté voisine. L'agrandissement en cours était destiné à un atelier de peinture. Leur idée était de réaliser de petites peintures portables intégrées aux vêtements, représentant des saints elfiques, des personnages du Dharsham, ou des icônes pour leur temple commun de Shelenaë.

Leur maison en planches n'était pas si simple: les poutres étaient sculptées et peintes, avec des vignes, des fleurs, des saints, des nymphes et des satyres de la nature. Mais dans des tons clairs, en bois blanc. Ce qui était original, en revanche, c'était la peinture: de nouvelles peintures modernes importées de l'Arlit, à quelques kilomètres de là. Elles donnaient des couleurs très vives, inaltérables, résistantes à la lumière et imperméables à l'humidité comme aux moisissures. Depuis quelques années, ces choses se répandaient rapidement dans l'Undar, comme un bien meilleur moyen d'expression pour les artistes et les bâtisseurs. D'où la nécessité d'un nouvel atelier.

 

En fait, la véritable limite géométrique entre l'Undar et l'Arlit n'était pas droite: des collines cachaient certaines parties, tandis que des vallées permettaient de voir plus loin vers l'Arlit, depuis le Nyidiath. Cela faisait une ligne compliquée. A partir de ce critère, il était en théorie facile de vérifier dans quelle partie nous nous trouvions: si nous voyons le Nyidiath, comme une orbe au-dessus de l'horizon, alors le Nyidiath nous voit aussi. Mais cela ne fonctionnait pas vraiment, avec l'opacité de l'air aux angles faibles, la réfraction, et même un petit effet de libration entre les deux mondes. Toute cette complexité a fait que le Conseil des Elfes avait simplement dessiné un cercle, englobant dans l'Arlit tous les endroits dont ils étaient sûrs qu'ils ne pourraient jamais être vus depuis le Nyidiath. C'était la limite officielle. Entre la limite officielle rectiligne et la limite réelle sinueuse se trouvait la Zone crépusculaire, partie de l'Undar.

Vous savez tous que les limites officielles sont destinées à être franchies. Il y avait des choses cachées mais intéressantes dans la Zone crépusculaire, et même bien plus loin dans l'Undar. Notamment «quelque chose» se trouvait au sommet d'une colline, à une heure de marche du village de Iris Bleu. C'était caché dans les arbres, de sorte que personne ne pouvait le trouver, à moins de passer outre les panneaux «Ermites en méditation». (En fait, preuve que les temps changent, il s'agissait d'un panneau plus humoristique «Ermites au travail»). Ils savaient qu'il était interdit d'y aller, et même d'en parler. Et ils n'iraient certainement pas, pour ne pas gâcher leur magie.

 

Le village de Iris Bleu était un des nombreux villages du bonheur dans tout le Dauriath. Il était essentiellement constitué du même type de maisons basses, réparties dans une sorte de jardin anglais, rassemblant des essences d'arbres rares séparés par des bordures et des murets de pierres sèches. Au printemps, cette pelouse était toute bleue de fleurs, et elle changeait même de couleur au fur et à mesure que le printemps progressait. Il n'était pas rare d'y voir des chevreuils et d'autres petits mammifères comme des écureuils et des ratons laveurs. Même la faune était enchantée par toute cette beauté, et elle venait la contempler et en profiter, se reposant au même endroit pendant des heures. De toute évidence, ils aimaient la compagnie des elfes! Mais ils avaient aussi leur propre charme, bien que totalement ingénu.

Sans parler des oiseaux, qui émerveillaient les lieux du petit matin au crépuscule. Certains, touchants et poétiques, commençaient à célébrer le jour nouveau dès qu'un soupçon de lumière apparaissait à l'est. D'autres gazouillaient joyeusement la symphonie du soleil. D'autres encore gardaient leurs solos chaleureux pour le soir, et même des sortes de rossignols enchantaient les nuits de leurs notes limpides.

Sans aucune pollution lumineuse, les nuits avaient des ciels étoilés fantastiques. Même sans Lune, il faisait assez clair pour marcher sur les chemins marqués de pierres blanches. C'était très agréable, tard dans la soirée, lorsqu'ils revenaient du Dharsham vers leur maison, de marcher dans une obscurité presque totale, admirant les étoiles comme si ils étaient dans le cosmos. Sous les arbres, lorsque le temps était pluvieux et qu'il faisait vraiment nuit noire, ils avaient de petites lanternes brûlant de l'alcool, apportant une lumière faible mais suffisante pour trouver leur chemin dans l'obscurité, vers leur maison jusqu'au lit. S'ils voulaient éclairer un atelier, ils avaient des modèles plus grands. Mais lorsqu'il n'y avait pas assez de lumière pour travailler, ils préféraient méditer ou discuter, apprendre, etc.

 

L'idée de lampes à alcool pour s'éclairer peut sembler contre-intuitive, car l'alcool ne produit qu'une faible lumière bleue. Mais les lampes avaient des manchons de chaux dans leur flamme, brillant d'un blanc éclatant sous l'effet de la chaleur. Ce qui leur donnait un air magique, un cylindre blanc brillant sans flamme visible. Les elfes de la région de Iris Bleu disposaient d'une bonne production d'alcool, grâce au brassage. L'huile ou la cire d'abeille étaient plus difficiles à obtenir, si bien qu'elles étaient utilisées pour la nourriture ou l'imperméabilisation. Pour obtenir un alcool suffisamment fort, ils disposaient de tours de distillation de faible technologie. Dans un contexte de basse technologie, on imagine plus volontiers un alambic qu'un objet moderne comme la tour de distillation. Mais il n'y avait aucune raison de ne pas utiliser les principes modernes, et une tour de distillation n'est pas plus difficile à construire qu'un alambic par un simple forgeron. Les calculs techniques complexes n'avaient été effectués qu'une seule fois, dans l'Arlit, et les plans d'un dispositif fonctionnel avaient été transmis dans l'Undar. Les tours de distillation peuvent produire un degré d'alcool beaucoup plus élevé qu'un alambic, tout en utilisant moins de bois de chauffage. On dit que des idées similaires ont été transmises par MakTar lui-même. Tant MakTar que les ingénieurs de l'Arlit possédaient l'art exquis de traduire des concepts avancés en moyens simples.

 

L'Arlit n'était qu'à quelques kilomètres de Iris Bleu, soit une heure de marche. Vivre si près n'était pas sans mystères. Parfois, ils voyaient des aurores la nuit, à l'horizon en direction de l'Arlit. Il y avait aussi des sons bizarres dans le ciel, mais cela se produisait toujours lorsque le temps était nuageux, de sorte qu'ils n'avaient aucune idée de ce que c'était.

Des elfes de l'Arlit venaient aussi régulièrement, discutant informellement de ce qui se passait dans la zone crépusculaire. Ils se montraient gentils et amicaux, mais ils s'intéressaient beaucoup à tout ce qui se passait d'inhabituel, voulant tous savoir sur les visiteurs étranges, les histoires bizarres, etc. Djindjinah leur a parlé des bruits dans le ciel, mais ils se sont contentés d'acquiescer, sans autre commentaire que de ne pas s'en inquiéter. Et de n'en parler à personne d'autre.

Heureusement, il y avait plus d'Elfes normaux qui allaient ou venaient de l'Arlit. Il n'y avait aucune sorte d'interdiction ou de contrôle, mais les voyageurs évitaient de parler de ce qu'ils avaient vu dans l'Arlit. Ceux qui le faisaient soulignaient qu'il y avait des choses extraordinaires, mais pas aussi extraordinaires que la paix biblique de l'Undar. Les Elfes de l'Arlit avaient une aura de mystère, comme des créatures extraordinaires. Mais ils insistaient sur le fait qu'ils restaient des Elfes ordinaires aimant la nature et les uns les autres. Mais dans un contexte différent. En particulier, l'Arlit était aussi beau et fleuri que l'Undar, et ils tenaient à ce qu'il le reste. Lorsqu'on les interrogeait sur les différences, ils devenaient évasifs, expliquant que les technologies modernes avaient changé beaucoup de choses. Mais elles n'avaient pas changé leur gentillesse et leur sagesse, leur amour de la nature et de la beauté.

C'est à partir de ces échanges que, depuis quelques années, les nouvelles peintures modernes avaient été introduites dans la zone crépusculaire de l'Undar, ou de l'acier dur pour les outils, du bon verre, des aiguilles à coudre plus fines, et d'autres choses. Mais tout cela devait encore être transporté à cheval, de sorte que cela ne pénétrait pas profondément dans l'Undar.

 

Par un bel après-midi, ils étaient occupés dans leur atelier de couture, lorsqu'un grondement sourd se fit entendre dans le ciel. Il était entièrement bleu et rien n'était visible. Mais seulement quelques minutes plus tard, un fracas soudain de branches cassées et de métal tordu ébranla les fenêtres.

Ils se sont regardés les uns les autres, pour vérifier si ce bruit étrange était réel ou s'il s'agissait d'une hallucination.

Puis ils se sont mis à courir pour voir ce que c'était.

Ils n'ont pas eu à aller bien loin, à peine deux cents mètres.

Ce qu'ils virent les rendit muets de surprise.

C'était au milieu d'un verger avec de petits arbres, bien séparés afin de garder de la place pour leur future croissance.

D'un enchevêtrement d'arbres brisés émergeait une chose métallique, de forme simple mais étrange. Elle était froissée, et même déchirée par endroits, montrant des détails internes compliqués, comme un corps ouvert. Elle saignait abondamment d'un liquide transparent à l'odeur forte. Par endroits, le métal cliquetait, comme lorsqu'on vient d'arrêter un poêle. Et en effet, il était brûlant, avec même un peu de fumée, même si, heureusement, rien ne brûlait vraiment.

Cette chose avait creusé un chemin dans l'herbe et coupé un sillage de cinquante mètres d'arbres cassés, fauchés comme de l'herbe. Mais comment était-elle arrivée là? Les autres arbres alentour étaient intacts, et il n'y avait pas de chemin assez large pour elle. Ils n'avaient aucune idée de ce que c'était, mais il en émanait une terrible vibration de danger immédiat et de catastrophe.

 

«A l'aide! Au secours!» fit une faible voix.

 

Il y avait un homme étrange, vêtu d'une veste et d'un pantalon marron, avec un chapeau rond kaki et des morceaux de verre sombre cachant ses yeux. Les mains pleines de sang, il essayait maladroitement de s'extirper de l'intérieur de la chose, par un trou qui ressemblait à un couvercle. Comme une seule personne, Dimah et Djindjinah se précipitèrent pour l'aider à s'extraire de la masse de branches cassées, jusqu'au sol. Il saignait à cause d'éclats de verre, et son visage était tuméfié, enflant et rougissant rapidement.

 

«F... fuyez... danger! Le feu!» prononça-t-il, encore groggy. Dimah et Djindjinah n'avaient pas envie d'en savoir plus, tout cela était si effrayant et dangereux, qu'il fallait filer au plus vite. Ils se mirent à traîner l'homme, tandis que les autres habitants du village arrivaient, signalant leur passage par de brefs cris.

 

Ils ont amené l'homme dans la maison de Dimah et Djindjinah, et l'ont allongé sur une table. Ils ont dû lui enlever ses vêtements pour vérifier ses blessures. Mais il a protesté en disant «coupez-les». C'était plus facile à dire qu'à faire, car le tissu était très dur, et ils ont dû utiliser leurs plus gros ciseaux. Une fois qu'il fut nu, ils découvrirent des coupures sur la poitrine, les bras et le visage. Aucune de ces blessures n'était vraiment grave, mais du sang coulait encore de plusieurs endroits. Ils essayèrent de l'arrêter avec des morceaux de tissu, mais ce n'était pas facile.

Soudain, ils entendirent un cor. Le cor des elfes de l'Arlit, ceux qui venaient régulièrement les voir! Ils avaient laissé un cor similaire au village, à utiliser en cas de besoin. En effet, le son était le seul moyen de communication, dans ce pays de vergers et de haies, où la vue dépassait rarement quelques dizaines de mètres. Les villageois soufflèrent deux fois dans leur propre cor pour signaler qu'ils avaient besoin de quelque chose. Bientôt, ils entendent des chevaux. «Nous devons les avertir de ne pas rester près de la chose, c'est dangereux», pensèrent-ils.

 

Lorsque les cavaliers arrivèrent, la première chose qu'ils dirent fut: «Ne vous approchez pas de l'avion! Il peut exploser à tout moment! Ça sent le kérozène jusque ici!». C'étaient les Elfes de l'Arlit, les agents qui leur servaient d'aimables visites pour savoir ce qui se passait dans la zone crépusculaire. Et en évitant de montrer de la haute technologie, comme en utilisant des chevaux. A cette occasion, ils se sont également montrés très bien organisés et efficaces. Trouvant l'homme blessé, la première chose qu'ils firent fut de s'emparer de son étui de revolver, que les Elfes du village avaient simplement posé sur une table à côté, ne sachant pas ce que c'était. L'un des visiteurs prit l'affaire en main, en disant: «Ok vous avez fait du bon boulot avec le pilote. Il a besoin de beaucoup de points de suture, mais Marlin peut le faire ici même, cela évitera de le transporter. Malheureusement, nous n'avons pas assez d'anesthésique». Aussitôt, le dénommé Marlin commença à appliquer de l'alcool de lampe comme antiseptique, puis à poser des agrafes sur ses blessures. Ça doit faire drôlement mal, pensèrent les Elfes. Mais ce pilote était un dur à cuire, et ils n'obtinrent de lui que quelques grimaces.

Ils expliquèrent alors: «Cet homme est un espion des gouvernements humains. Il essayait de pénétrer dans l'Arlit en survolant l'Undar avec son avion. Nous avons tiré sur ses moteurs avec nos propres avions pour le forcer à atterrir. Nous savions qu'il pouvait être blessé ou même tué, mais il le savait aussi, avant de s'engager dans cette activité. Personne ne l'y a forcé».

De longues explications ont suivi, sur ce que sont les avions, les pilotes, les moteurs, et surtout les espions, une chose plus bizarre encore qu'une lourde machine de métal capable de voler dans le ciel. Avec bien sûr des mises en garde pour ne rien répéter de tout cela au-delà du village. Puis:

«Avec ses blessures, nous ne pouvons pas le transporter facilement. Il doit rester ici quelques jours. Pouvez-vous le garder? Avez-vous une pièce avec une serrure pour en faire une prison?

-Euh, non, nous n'avons pas de serrures. La pièce où se trouvent les alambics est fermée à clé, parce qu'elle peut être dangereuse.

-De quel côté de la porte une serrure doit-elle se trouver pour une prison? A l'intérieur ou à l'extérieur?»

Les agents elfiques furent déconcertés de les voir si ingénus. Puis ils se mirent à rire!

«Au moins, nous avons réussi une chose: garder les Elfes de l'Undar innocents et sans arrière-pensées, ha ha ha»! Puis une autre ajouta: «Je vais rester avec vous. Pour l'instant, il est plutôt inoffensif, mais il ne le sera peut-être pas toujours. J'ai saisi son pistolet et je pourrai m'en servir contre lui, au cas où il essaierait de faire le vilain. Maintenant, il faut l'interroger».

Bon, à l'idée de l'interrogatoire d'un espion, on imagine le pire. Pas avec les Elfes: celui nommé Marlin était aussi capable de contrôler la volonté du prisonnier, de sorte qu'il leur donna docilement des séries de nombres compliqués, et son nom, Dunkan. Tout ce dont ils avaient besoin. Cela ne prit que quelques minutes. Ensuite, ils lui ont expliqué:

«Ok, Dunky, tu connaissais la loi avant d'accepter cette mission. Tu savais que tout le Dauriath est interdit à tout Humain sans autorisation. Les avions modernes remplaceront peut-être bientôt l'exil à vie par l'expulsion, mais en tant qu'espion tu resteras notre prisonnier, et tu le resteras jusqu'à ce que le Horiathon rouvre et que la situation soit réglée. En attendant, nous avons à cœur de ne pas te maltraiter ni de faire quoi que ce soit de mal, mais de te traiter avec humanité. Mais nous ne te laisserons pas échapper, et j'ai maintenant ton revolver au cas où tu essayerais de jouer les durs. N'oublie pas: les balles volent plus vite que la magie!» Les autres agents de l'Arlit gloussèrent à ce rappel, sorte de petite vengeance amusante.

Marlin poursuivit: «Bon, comme nous ne pouvons pas te transporter, tu sera pendant quelques jours l'invité de ces gens ici. Tu aura ainsi la preuve que nous ne sommes pas les sadiques cruels en latex noir que vous décrivez dans vos films. Profite de l'hospitalité et de la gentillesse des Elfes, et essaye de découvrir ce qui nous rend heureux dans un endroit aussi merveilleux, afin que cultiver de meilleures motivations dans ta vie, plus tard.»

Ils sont sortis, mais les elfes du village purent encore saisir quelques phrases:

«Nous examinerons l'avion lorsque les risques d'incendie auront disparu. La dernière fois que cela s'est produit, ils avaient de puissantes caméras et des appareils d'espionnage radio. Ensuite, nous devrons nettoyer les lieux, afin qu'il ne reste aucune blessure dans cet endroit merveilleux.

-Crois-tu qu'il a vu le relais télécom laser sur la colline voisine?

-C'est une possibilité. Raison de plus pour qu'il reste dans le Dauriath. Les installations sont bien camouflées sous les arbres et des toits d'herbe, mais nous ne pouvons pas cacher les panneaux photovoltaïques. On les a juste placés dans un champ en contrebas, pour ne pas trahir le véritable emplacement».

 

Finalement, les agents elfiques sont partis, sauf Rosy qui s'est occupée du prisonnier. Les Elfes du village l'amenèrent dans le bâtiment central, pour enfin l'enfermer dans... le temple de MakTar, la seule pièce en briques. Ils ont poussé de lourds meubles pour bloquer la porte de l'extérieur. D'habitude, les temples de MakTar sont utilisés pour la magie défensive, et ils ont des peintures murales effrayantes, qui ne peuvent pas être montrées à n'importe qui. Heureusement, celui-ci était encore en construction et n'avait pas encore été décoré. Le Conseil des Elfes avait demandé que des temples de MakTar et de Shelenaë soient construits dans chaque village, avec un programme de méditation spécifique à suivre pendant la bataille du Horiathon.

 

Le premier jour, les Elfes ont laissé le prisonnier sur un matelas, se contentant de lui apporter de la nourriture, de changer ses bandages et d'autres nécessités. Plus tard, il put commencer à se lever. Rosy sentit qu'il n'était pas agressif pour le moment, et elle décida qu'il prendrait ses repas avec les autres Elfes du village. C'était bien mieux ainsi, car il pouvait voir à quel point la vie elfique est agréable. Ils ont même réussi à le faire se promener dans les environs, mais toujours avec Rosy à dix mètres derrière, avec son pistolet. En effet, Dunkan se montrait calme et collaboratif, mais il n'inspirait pas vraiment confiance. Quelque chose ne tournait pas rond avec lui, mais ils ne savaient pas quoi.

 

Tout d'abord, il fallut lui trouver des vêtements, car sa combinaison de pilote était totalement ravagée. Il dut accepter un pantalon et une chemise lilas, qu'il considéra avec méfiance avant de les enfiler. Les elfes avaient rempli un petit sac avec ses papiers et ses effets personnels, comme une photo de famille. «Votre femme?» Il ne répondit pas. Rosy expliqua: «Normalement, nous devrions la contacter. Malheureusement, en raison de la nature de ses activités ici, sa capture doit rester secrète, si bien que sa femme devra attendre pour être rassurée. C'est malheureusement la situation qu'il a créée». Elle jeta un regard oblique au pilote, qui fit mine de ne pas l'entendre.

C'est donc dans un silence gêné qu'ils visitèrent le merveilleux verger de printemps, tout rose de cerisiers en fleurs, résonnant du joyeux gazouillis de mille oiseaux, avec de temps à autre la mélodie d'un merle. Le soleil jouait avec le nouveau feuillage frais, encore dans ses verts tendres, illuminé de l'intérieur comme un vitrail, avant que les chaleurs de l'été ne le rendent dur et brillant. Ils firent le tour du village, empruntant quelques-uns des nombreux sentiers. D'habitude, les elfes gémissaient de plaisir ou se mettaient à chanter. Djindjinah avait apporté sa flûte, et elle joua quelques notes. Mais elle ne se sentait pas bienvenue. «Une telle beauté mérite le meilleur art», dit-elle, mais elle n'avait pas le cœur à continuer.

D'habitude, ils ne mettent pas de mots sur ce qui est si évident pour eux tous: profiter de cette puissante vibration de bonheur. Si ils pouvaient l'agrémenter de musique, c'était encore mieux. Sinon, le silence était le meilleur moyen d'en profiter.

Le repas fut aussi un grand moment. Les Elfes mangeant moins que les Humains, ils ne font qu'un ou deux repas par jour, plus légers que ceux des Humains. Rosy leur a dit que Dunkan avait besoin de beaucoup plus. Par gentillesse, ils décidèrent de lui tenir compagnie aux repas, à tour de rôle.

Et ils firent les choses en grand: une exquise salade de légumes verts et orange du jardin, décorée de pétales roses. Pour le plat principal, plusieurs céréales cuites ensemble, avec des pommes de terre, remplissant tout le bâtiment d'un délicieux arôme appétissant. Le secret résidait dans plusieurs épices qu'ils cultivaient eux-mêmes, des sortes de baies colorées et des feuilles séchées réduites en poudre. Pour le dessert, ils avaient encore des pommes de la dernière saison, qu'ils avaient sorties du sable. Pour les Elfes, c'était un véritable festin. Ils étaient loin de se douter que pour Dunkan, habitué aux viandes fortes et aux sauces lourdes, c'était une pénitence. Mais il avait un problème plus grave, qui commençait à le rendre nerveux.

Voyant Dunkan agrippant ses bandages, les Elfes décidèrent de le ramener sur son matelas, dans la prison improvisée. Il était de toute façon encore très faible, et il n'est pas recommandé de faire du sport quand on a cinquante points de suture et qu'on a perdu un litre de sang. Son corps le lui rappelait.

Plus tard dans l'après-midi arriva Emerily, prêtre de MakTar, du village voisin de Pashir. C'était un grand Elfe dégingandé, aux cheveux châtains clairs ondulés, toujours en mouvement et toujours drôle. Typiquement le genre un peu farfelu qui réussit bien dans la prêtrise de MakTar. Entendant du bruit dans la cellule de Dunkan, il frappa à la porte. «Oui?» fut sa réponse surprise: Dans tout le monde Humain, personne ne frappe à la porte d'une prison pour demander au prisonnier la permission d'entrer! Emerily entra donc, refermant la porte derrière lui. Il resta un moment ainsi, seul avec le prisonnier. Cela rendit Rozy nerveuse, car elle était responsable de la sécurité d'Emerily. Lorsque ce dernier sortit, il toucha l'arme de Rozy à travers ses vêtements, en riant: «Un prêtre de MakTar peut se débrouiller tout seul». Rozy fut stupéfaite: rien ne permettait de savoir qu'elle portait un pistolet caché. Comment pouvait-il savoir? Oh, c'est un prêtre de MakTar, ils font toujours des trucs bizares comme ça.

«Son problème, commença Emerily, c'est qu'il n'a pas de cigarettes. Bon, on n'en a pas non plus, n'est-ce pas?

-Des cigarettes? Qu'est-ce que c'est? demanda Dimah.

-Une drogue pour les Humains. Elle les rend insensibles aux vibrations de la nature, leur fait perdre leur capacité d'introspection et bloque leur libre arbitre. Elle produit également de graves problèmes de santé et des souffrances. Mais si ils manquent leur dose, c'est encore pire: une profonde frustration, de l'agitation et de la colère, et même des symptômes douloureux. Ils sont alors obligés de fumer leur cigarette encore et encore, même si cela les dégoûte. Dans son cas, il lui en faut vingt par jour.

-Oh quelle horreur, c'est vraiment un truc de Niszun», dit Djindjinah. (Dans ce monde, Niszun est l'équivalent de satan. Les Elfes évitent de prononcer son nom). Mais que faire?»

Emerily répondit: «Le plus proche bureau de tabac est à 12400 kilomètres. Cours!» s'esclaffa-t-il. Puis, plus sérieusement: «Le sevrage le rend déjà nerveux. Ils peuvent se mettre en colère et devenir violents. Mieux vaut le laisser dans sa cellule, et lui apporter à manger. Oubliez de lui montrer les beautés de la nature. Il n'est de toute façon vraiment pas en état de l'apprécier, ni même de la ressentir. Les cigarettes crient beaucoup plus fort».

Le prêtre avait un langage expéditif, affirmant que c'était une qualité pour la prêtrise MakTar: «Ce Dunk a cagué dans le temple. Je ne nettoierai pas avant qu'il parte. Et le plus tôt sera le mieux, il n'y a aucun intérêt à ce qu'il reste ici.»

Rozy a répondu: «Je sentais bien que quelque chose n'allait pas. C'est donc pour ça. Bon c'est vrai, la situation est instable. Demain, mes collègues viendront inspecter l'avion. Emmenons-le là-bas, pour qu'ils puissent s'occuper de lui. Avant, nous allons lui fabriquer une civière, pour qu'il ne rouvre pas ses plaies en marchant ou en montant à cheval. Et pour la sécurité, on l'attache sur la civière. On lui mettra aussi des œillères. Il n'a pas besoin de voir nos experts en électronique à l'œuvre».

C'est ce qui fut fait. Ils ont rapidement fabriqué une civière solide, dont Dunkan ne pourrait pas s'échapper. Le lendemain, ils l'ont porté comme un colis jusqu'à l'épave de l'avion.

Les techniciens de l'Arlit étaient déjà à l'œuvre, coupant branches et tôles pour accéder au matériel d'espionnage.

«Ne vous approchez pas! Il y a des restes de kérozène dans les ailes. Nous avons pompé au mieux dans ces jerrycans. Mais il peut en rester.»

Voyant Dunkan attaché sur sa civière, Marlin semble soulagé. «Oh, c'est bien mieux que vous l'ayez amené ici. Nous aurions dû le faire dès le début. Nous avons parlé à notre hiérarchie. Les pilotes ont tout un programme pour résister à ce qu'ils appellent le lavage de cerveau. Essayer de l'aider était inutile, il n'aurait jamais ouvert son cœur à la beauté et à la gentillesse de notre monde. De plus, ils ont pour instruction de s'échapper et de rejoindre leur base par tous les moyens possibles. Une fois en liberté dans la nature, qui sait ce qu'il aurait fait à des villageois sans méfiance.

-Passer par tout l'Undar?

-Il pourrait essayer, en effet. Mais il devrait traverser des milliers de kilomètres de forêts, deux océans et le Horiathon. Une entreprise désespérée, mais dans son état d'esprit, il n'a pas le choix. Nous avons déjà eu un cas, mais lorsqu'il a essayé de menacer les doux Elfes mon-violents amoureux des fleurs, ils ont décidé de faire la non-action contre lui. En conséquence, ils doivent maintenant le garder pendant six mois, le temps que toutes ses fractures guérissent.

-Ouah! J'espère ne pas avoir à faire ça.

-Il vaut mieux que ce ne soit pas le cas. Le plus dur dans la non-action, c'est de ne pas y mettre de colère, afin d'éviter d'engager notre karma.»

Dunkan marmonna quelque chose, apparemment en colère.

«Oh Dunky, c'était ton ami? Je suis désolé. Mais rassure-toi, tu auras plusieurs années à passer avec lui.

-Où l'emmenez-vous?

-Dans une prison. Ne t'inquiète pas, ce sont de jolis petits endroits, ils ont chacun leurs arbres, un jardin et tout le reste. Surveiller des prisonniers est un travail très désagréable, et sacrément malsain pour notre karma. Nous nous arrangeons donc pour qu'ils puissent obtenir tout ce dont ils ont besoin, tout en étant physiquement incapables de s'échapper. Ils ne peuvent pas non plus se parler sans être surveillés, afin de ne pas entraver leur évolution positive. Certains guérissent, en effet, et deviennent des Elfes, ou du moins des Humains positifs.

-Et qu'en sera-t-il de sa dépendance à cette chose, la cigarette?

-Le mieux est de ne pas lui en donner. Ça fait mal, et il en souffrira pendant plusieurs mois. Mais c'est la seule façon pour lui de guérir de sa dépendance. Il en va de même pour le vin, la viande, etc. Nous ferons de notre mieux pour l'aider à surmonter son envie, en utilisant la magie si nécessaire. Cela peut fonctionner, mais nous ne pouvons pas forcer son libre arbitre. Il a une décision à prendre par lui-même, pour que notre aide soit vraiment efficace.»

Dunkan manifesta sa désapprobation par une bordée de jurons. Sans effet: les Elfes de l'Undar immaculé ne connaissaient tout simplement pas ces mots. «Ha ha ha!» fit Marlin.

 

Les jours suivants, le village reprit sa vie normale. Pendant une semaine, il y flotta un sentiment de gris. Ils ne se rendaient pas compte, mais ils avaient été confrontés à un acte de guerre. Même si il n'avait pas causé de blessures ni de destructions, sa simple nature d'acte de guerre avait un effet douloureux sur l'égrégore de leur joyeux village. Pourtant, les agents de l'Arlit avaient assuré efficacement leur sécurité physique. Ils avaient également pris soin de protéger leur humeur positive et leur douce vibration. Le bonheur de Iris Bleu guérirait en quelques semaines, mais il resterait quelque part une tache sur leur innocence immaculée.

 

Même s'ils évitaient de se rendre à l'épave de l'avion, il en provenait d'étranges gémissements. «Un camion tout-terrain», disait Emerily, qui connaissait l'Arlit et s'y rendait souvent. Mais ils en avaient assez de tout cela, et ils ne voulaient pas savoir ce qu'est un camiontoutérain.

Après avoir saisi les appareils électroniques de l'avion, les experts ont commencé à démonter sa structure et à ramasser tous les débris qui l'entouraient, jusqu'au moindre éclat de verre. Avec la fin du printemps, l'herbe poussait maintenant vigoureusement, guérissant les blessures de la terre.

Le tissu de leur égrégore se réparait aussi, avec beaucoup de peintures, de chants, de communion dans le Dharsham, de contemplation des fleurs, de flûte, d'amour et de nuits tendres embrassés ensemble sous la lumière poétique des étoiles.

Pendant plusieurs mois, la petite source alimentant le village sentit le kérozène, les obligeant à aller chercher de l'eau plus loin dans le village de Pashir. Mais il en est allé de cela comme de toutes les autres choses: l'odeur a fini par disparaître, pour devenir un souvenir.

Au printemps suivant, ils avaient replanté les arbres cassés, et il ne restait plus aucune trace du crash. Le soleil brillait à nouveau dans leur cœur aussi! Cet incident n'avait pas marqué durablement leur vie.

 

Environ deux ans plus tard, ils reçurent une lettre de... Dunkan! En termes simples, il les remerciait de leur chaleureuse hospitalité et s'excusait d'avoir été un rustre. Il allait rester en prison encore plusieurs années, mais Marlin expliqua qu'ils avaient un programme de rééducation pour les prisonniers, et des visites régulières de hauts Elfes. Certains prisonniers évoluaient positivement, d'autres non...

 

Iris Bleu reçut également un équipement radio, pour synchroniser leurs méditations pendant la bataille du Horiathon. C'était une petite radio transistorisée, fonctionnant à l'aide d'un générateur à cellules solaires. Les Hauts Elfes connaissaient bien le terrible pouvoir de la radio et de la télévision: faire penser des dizaines de millions de personnes à la même chose en même temps. Puis passer immédiatement à autre chose, afin de ne pas laisser à l'esprit critique le temps d'opérer. Ce qui donne à toutes les mauvaises nouvelles l'impact destructeur d'un gigantesque rituel satanique. Ils ont également utilisé ce pouvoir, mais seulement avec des personnes consentantes, et seulement pour le bien.

 

La bataille du Horiathon fut la dernière véritable guerre. Les Elfes s'y étaient préparés pendant les sept siècles de leur exil dans le Dauriath. Ils n'avaient plus besoin du Nyidiath, mais ils réussirent à démanteler toute son industrie militaire, rendant les grandes guerres à jamais impossibles.

 

Dans les années qui suivirent, certaines technologies peu invasives mais très utiles ont été autorisées dans l'Undar, comme l'Internet. C'est ainsi que Dimah et Djindjinah retrouvèrent Dunkan dans un monde virtuel. Sa femme l'avait attendu jusqu'à sa libération après la bataille du Horiathon, au lieu de se remarier. Elle n'avait aucune information sur lui depuis tout ce temps, mais elle était sûre qu'il reviendrait. Elle fut bien sûr heureuse de le voir libéré de la prison, mais la délicieuse surprise était aussi de le voir débarrassé de toute drogue. Surprise totale aussi pour sa fille Jina, qui n'avait aucun souvenir de son père.

Dunkan était toujours un humain, mais totalement changé: un grand-père heureux, joyeux chef de bande d'une tribu exubérante de petits-fils et de petites-filles. Comme ils vivaient chacun dans des endroits différents, ils utilisaient ce monde virtuel pour se réunir, jouant un village de Tinies faisant des fêtes, des espiègleries et des farces. L'une des beautés de la vie virtuelle est que l'on peut être ce que l'on veut, un Tiny ou un Elfe. Mais dans le Nyidiath, il y a de fortes chances que l'Elfe virtuel soit aussi un véritable Elfe! Dunkan avait gardé le diminutif «Dunky» pour son personnage de Tiny. Et il avait raconté maintes fois à toute sa famille l'histoire épique de son atterrissage en catastrophe dans les terres sauvages des Elfes sauvages, se battant à poings nus contre des hordes de guerriers elfes échevelés et hurlants, ne finissant par être capturé que sous leur nombre. «C'est vrai?» demandèrent les petits-enfants lorsqu'ils invitèrent Dimah et Djindjinah dans leur maison virtuelle rigolote en forme de champignon. «Hem hem oui, bien sûr» répondit Djindjinah, et ils se mirent tous à rire.

C'est ainsi que le retour des elfes s'est réellement produit. Par l'amitié et par les crêpes, pas par la guerre.

 

Da end.

Lecture audio et musiques

Musique de fond: toute musique de nature convient pour l'histoire de Dimah et Djinjinah, en particulier Prélude à l'après-midi d'un faune, par Debussy.

La musique joue un rôle important dans ces histoires: donner la vibration. Pour cette raison, je recommande d'écouter certaines en lisant, ou en écoutant l'audio. Parfois elles ont été la source d'inspiration. Toutefois, peu de musiciens permettent les oeuvres dérivées. J'indique alors volontiers comment écouter ces musiques, avec des liens.

 

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La génération de cette histoire (Spoiler alert!)

Cette histoire a été écrite en mars 2023. Elle a pour but d'illustrer de manière concrète ce qui différencie les bonnes personnes, symbolisés par les «Elfes», des futures bonnes personnes, symbolisées par les Humains. Dans la plupart des jeux vidéo, des jeux de rôle et des films, les Elfes sont représentés avec des cheveux longs et des oreilles pointues, ce qui leur donne un air cool. L'arnaque ici est que ces faux Elfes ont en fait le même ego tyrannique et la même psychologie désastreuse que les personnages de séries télévisées, pourris de névroses de haine et d'attachement, tout en étant dépourvus de tout libre arbitre et même d'introspection élémentaire. Ce que font les Elfes dans mes histoires, c'est simplement de contrôler cette psychologie délétère, afin qu'ils cessent de briser leur vie à chaque coin de rue. Et dans le silence paisible laissé par l'absence d'ego et de névroses, naissent le bonheur, la liberté, le libre arbitre et la magie. Il n'y a rien d'extraordinaire à cela, et nous avons tous les outils sur Terre pour faire la même chose. Et pour devenir des «Elfes»...

Mes histoires ne sont pas dictées par l'actualité mondiale, et je fais très attention à ne pas laisser d'occasion à celle-ci de les gâcher, même subtilement. Cependant, il y a parfois des coïncidences sérendipiteuses. Aujourd'hui, avec la situation en Ukraine, nous voyons comment le fait d'éviter de haïr indistinctement tous les citoyens d'un pays a transformé une dispute de frontières sans intérêt en un combat pour les valeurs humaines que tout le monde soutient.

Le nom «Djindjinah» est ce qui arrive lorsque les paroles de la chanson «Jean Genie» de David Bowie tombent dans une oreille Française.

 

 

 

 

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