Explication des symboles

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Épistémologie Générale: II épistémologie

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II-3 Repousser les limites de la science

 

(Permalien)(Chapitre 14 dans la version 1)

Pour les archives Wayback Machine d'avant Mai 2024, cherchez l'ancien URL:
http://www.shedrupling.org/nav/shenav.php?index=30203&lang=fr&e=f

 

Comme je l'ai clairement laissé entendre dès le début, moi-même, et beaucoup d'autres, ne sommes pas totalement satisfaits de la science actuelle, malgré ses indéniables et très méritoires succès. La principale raison est que, si la science comme moyen de connaître le monde triomphe en physique et techniques, elle est par contre remarquablement absente dans les domaines immatériels comme la spiritualité, l'éthique, la signification de la vie, la politique... Au point que l'on dit que ces domaines «ne sont pas de la science», et qu'il y est laissé le champ libre à toutes sortes d'«opinions» arbitraires, de «croyances», voire à des idéologies dangereuses que l'on n'est pas libre de réfuter malgré leur fausseté évidente, puisqu'il ne «faut pas» en parler, ou qu'on «ne peut pas» faire de science» dans ces domaines! Ainsi on arrive à une «légitimité de la croyance» dans ces domaines! Avec souvent de terribles conséquences humaines...

La science traditionnelle a clairement fait un CHOIX des sujets qu'elle accepte ou non d'étudier. Bien entendu ce choix de sujets admis et de sujets tabous est dicté par des idéologies (il ressort donc tout à fait du biais psychologique). Ces idéologies ont pour nom rationalisme, scientisme, technocratie, athéisme, matérialisme... mais n'allons pas trop vite car nous n'avons pas encore définis ces mots (chapitre II-6) ni étudié en détail ces idéologies (chapitre II-7).

Comment une science exacte a t-elle pu ainsi limiter elle même ses objectifs? Comment le projet d'une science générale, telle que envisagée par ses propres fondateurs, Newton, Leibniz et d'autres, a t-il été abandonné? Pourquoi ces idéologies, disons en gros matérialistes, ont-elles pu tromper et manipuler un milieu qui a pourtant su bien plus que beaucoup d'autres démontrer sa méthode, sa sincérité et sa capacité de remise en cause? C'est qu'il y a une raison profonde, un paradigme inconscient, une confusion de base inscrite dans la méthode elle-même:

DES LE DEPART ON NE S'EST INTERESSE QU'AUX PREUVES MATERIELLES.

LA NOTION DE REALITE A ETE CONFONDUE AVEC LA NOTION DE MATERIALITE!

Il a été commis ce que nous avons appelé au Chapitre I-5 une révolution sans discernement (dans le diagramme que nous étudierons au chapitre II-6)

 

Tout ce qui n'est pas matériel n'est pas considéré comme réel, n'est pas considéré comme observable, et n'est donc pas considéré comme digne d'étude. Pire, l'idée s'est répandue que toute affirmation dans les domaines immatériels comme l'éthique, la spiritualité, la politique, la signification de la vie, ne pouvant être matériellement démontrée, n'ayant aucun sens physique, est du domaine des croyances, et donc que cela ressort uniquement du biais psychologique!

Cela a même été jusqu'à de dangereuses affirmations comme quoi la morale et l'être humain n'auraient aucune valeur, un moyen bien pratique pour justifier leur exploitation... mais ce n'est là qu'une infection opportuniste sur une maladie bien plus profonde.

On a pu même parfois voir cette démarche matérialiste devenir si naïve et si arrogante que l'on peut parler de véritable déification de la matière, nouvelle «religion» dont les «prêtres» seraient les «scientifiques» omniscients et infaillibles, avec leurs «temples» et leurs «livres saints».

 

Comment en est-on arrivés là? Comment une erreur aussi énorme et évidente a t-elle pu passer inaperçue pendant plusieurs siècles? Une relecture de l'histoire de la science (chapitre II-2) nous fera comment comprendre comment une erreur aussi grossière a pu se faite passer pour une «vérité de base acceptée par tous»:

Galilée trouva dans ses observation une preuve matérielle concernant une affirmation considérée comme étant du domaine religieux (sur l'organisation du système solaire). On en déduisit que la preuve matérielle était la méthode efficace, sans se rendre compte que le mot «preuve» était suffisant: il était inutile donc d'en réduire la portée en précisant «matérielle».

Le Siècle des Lumières, sans renier la religion et autres matières subtiles, en délaissa l'étude, car il ne s'offrait à eux aucun moyen matériel de vérifier ou d'infirmer les affirmations religieuses, éthiques ou spirituelles. Ce qui déjà à l'époque trouva les intellectuels sans défense devant les élucubrations d'un marquis de sade, laissant l'Eglise seule au front moral, qu'elle défendit très maladroitement: son dogmatisme et sa pudibonderie monta tout le monde contre elle. Et ceux qui posaient des revendications légitimes (liberté, démocratie) eurent à se battre contre l'intégrisme catholique... qui, lui, se réclamait de l'amour christique! Ce sac de confusions aboutit à un ressentiment très vif contre la religion, qui se concrétisa brutalement par les persécutions anti-religieuses de la Révolution Française.

Ce ressentiment devint une habitude au 19eme siècle, qui avait développé une grande aversion contre la religion, et les domaines «associés» de la morale et du spirituel. Cela finit même par être perçu comme une «vérité évidente»: le dogme matérialiste, toujours sous le prétexte qu'on ne peut aborder le monde de l'esprit par des expériences matérielles (forcément). On pourrait presque dire que ce dogme n'est qu'une rationalisation (au sens psychologique) de la haine de la religion. Les idéologies matérialistes et anti-spirituelles suivirent, avec pour conséquences des choses comme les théories racistes en anthropologie (justifications «scientifiques» du colonialisme), ou en politique les deux jumeaux insupportables: marxisme et capitalisme (note 11, tous deux se prétendant «la science» ou «la réalité»).

Auguste Comte et son positivisme fut certainement le plus grand théoricien du matérialisme et du déni total de la conscience, qui a culminé avec son incroyable «positivisme juridique», où la seule justification des lois est le consensus ou l'autorité! Certainement, la chaîne des disciples de Comte peut se suivre jusqu'aux grandes idéologies du 20eme siècle: capitalisme, marxisme, nazisme, et généralement les méthodes d'administration des états modernes. Toutefois, Comte s'est plus tard rendu compte, à travers son histoire d'amour malheureuse avec Clotilde de Vaux, que la conscience humaine a ses propres déterminants, intrinsèques. Il a cherché a corriger son positivisme en conséquence, mais ses disciples l'ont alors considéré comme fou.

Ce dernier détail prouve clairement que les actuels disciples de Comte utilisent son «positivisme» comme outil pour la dénégation de la conscience et de son contenu. Cela est clairement visible par exemple dans la rhétorique justifiant la destruction de la nature pour construire des autoroutes: aimer la nature et le silence est considéré comme un argument «irrationnel» et invalide, tandis que gagner des fortunes avec la destruction de la nature est considéré comme une «réussite sociale» très estimée, qui place son auteur au dessus des lois communes!

 

Ces délires ont abouti au vingtième siècle à une société dominée par un matérialisme quasi-religieux, où toute dimension humaine est rejetée comme «subjective», où la nature est une tache vide sur la carte, qu'il faut «aménager», où toutes nos souffrance humaine se «compensent» par des indemnités financières. Réduit à son compte en banque et à son emploi, l'être humain n'est plus sensé éprouver aucune souffrance à vivre dans un univers de plus en plus cacophonique, dangereux, solitaire et déstructuré! Un simple numéro sur une liste n'éprouvera certes aucun chagrin à apprendre que son cadre de vie à été débarrassé d'objets inutiles et non rentables tels que coins moussus, arbres, ruisseaux, douces prairies, pour y installer des objets éminemment rationnels et utiles tels qu'usines, supermarchés ou lignes haute tension; un compte en banque ne peut être dérangé par le bruit de l'autoroute voisin, ni se soucier de la survie de ses descendants... Quant à notre spiritualité, réduite à des «croyances», elle est de plus en plus assimilée à une maladie honteuse qu'il faut cacher en privé... (Forcément: si tout le monde se mettait à pratiquer l'altruisme en public, le capitalisme s'écroulerait).

Quand, dans les années 1970, confrontées à des interpellations comme le respect de l'écologie, la recherche du bonheur, voire la simple défense des droits de l'homme les plus élémentaires, ces idéologies se sont encore raidies, niant et rejetant comme «subjectives» toutes les dimensions de l'humain autres que économiques et techniques.

La science ne fut pas de reste, avec des barjoteries comme l'appel de Heidelberg (1992), signé par plus de quatre mille scientifiques de haut niveau. Ce genre de choses posait clairement la science en ennemie de la nature et de l'humanité, et il ne faut pas s'étonner si mes jugements étaient bien plus sévères dans la première version. Il faut aujourd'hui reconnaître que la manipulation était assez vicieuse: présenter le questionnement écologiste comme une forme d'intégrisme, qui allait «trop loin». Evidemment, les auteurs de l'appel, en relation avec la secte Moon, savaient comment manipuler! Et les blouses blanches sans expérience de la politique étaient faciles à berner, même avec ce vague texte aux phrases pompeuses et tordues.

Mais aujourd'hui (2010), la science, confrontée à ses propres découvertes sur le changement climatique, a su prendre ses distances avec toutes ces propagandes. Les réactions infantiles des idéologistes montrent à quel point ils avaient l'habitude de voir la science sous contrôle, et leur peur abjecte quand ils la voient à nouveau indépendante.

De plus, il faut reconnaître que de plus en plus de scientifiques s'intéressent à l'étude de la conscience. Mais ils doivent pour cela sortir des institutions, et ils n'ont pu jusqu'à présent que rassembler des faits, sans vraiment de méthode ni de cadre théorique. Ce livre ambitionne de les leur fournir. Voyons comment.

Et pourtant les mathématiciens savent le faire!

(Permalien) Il est bien évident que si il existe des réalités spirituelles, ou tout simplement morales, sentimentales, artistiques, la preuve ne peut absolument pas en être cherchée dans un domaine physique (matériel) qui n'est pas le leur, car il s'agit de domaines immatériels. On ne peut pas plus rechercher la preuve matérielle d'une loi morale qu'on ne cherchera de preuve spirituelle à une loi physique.

 

Et pas plus qu'un mathématicien ne recherchera de preuve matérielle à un théorème mathématique.

 

En effet, il existe tout de même un domaine immatériel reconnu et étudié par la science actuelle: Les mathématiques. Elles disposent de leur propre système de preuves, toutes immatérielles, qui permet infailliblement de savoir si un énoncé mathématique est vrai ou non, sans aucune référence à aucun objet matériel. Essayez par exemple de démontrer que deux et deux font quatre, vous utiliserez peut-être un boulier, mais ça marchera aussi bien si vous vous contentez de visualiser (note 12) ce boulier. Voici typiquement un domaine immatériel où une expérience immatérielle, qui plus est intérieure à l'esprit humain, suffit seule à établir la vérité, sans le recours à aucune preuve matérielle. En mathématique, nous n'utilisons pas les organes des sens, mais nous observons tout de même des résultats de raisonnements, car notre conscience a la capacité de percevoir directement les phénomènes mathématiques sans le recours à aucun organe des sens. Les réalités mathématiques aussi sont observables, même si elles ne sont pas matérielles. Et il n'y a là ni parapsychologie, ni croyances, ni Nouvel Age.

 

Avant de continuer, j'aimerais d'abord me débarrasser de deux vues fantaisistes. La première serait une forme de «matérialisme mathématique» qui affirmerait que les mathématiques seraient une sorte de «réalité énergétique», une «autre dimension» ou quelque chose de ce genre. Nous partageons ici le point de vue des mathématiciens les plus orthodoxes, où les entités mathématiques n'existent qu'en tant que relations entre les objets dont elles parlent. Cinq doigts? Il n'y a pas de «cinq» qui trônerait quelque part dans un espace parallèle, mais cette relation appelée Cinq qu'ont les doigts entre eux. Pas six, pas quatre, cinq. Cette forme de réalité abstraite est si ténue mais pourtant infiniment solide. Cela nous suffira.

L'autre vue fausse, beaucoup plus connue et hélas défendue par nombre de mathématiciens, serait que les mathématiques ne seraient qu'une construction de l'esprit humain, et donc qu'elles n'auraient pas de réalité propre. Je suis désolé, mais quand on pose une équation telle que x² = 4, les mathématiciens disent tous qu'il existe deux solutions. Ils ont même créé pour cela un symbole, E, qui signifie précisément «Il existe». Mais on ne peut pas trouver plus ni moins de deux solutions à cette équation: nous sommes contraints d'accepter ce résultat, nous ne pouvons construire une troisième solution. Si on ne peut pas la construire, alors elle ne peut pas être une construction de l'esprit humain. On ne peut pas créer de solutions, juste on les découvre. C'est en ce sens que je dis que les réalités mathématiques existent.

Un contre exemple est le domaine juridique: On peut créer des lois, modifier des lois, supprimer des lois. On peut même créer des lois absurdes, auxquelles personne ne peut obéir, parque qu'elles contiennent une erreur logique, ou qu'elles sont physiquement impossible à appliquer. Aussi il est clair que les lois sont une création de l'esprit humain, des conventions. Au contraire, les lois mathématiques ne sont pas créées, mais trouvées (démontrées). Si on les trouve, c'est bien qu'elles existaient déjà avant. Aussi il est clair que les mathématiques existent indépendamment de l'esprit humain, alors que les lois n'existent que comme conventions dans l'esprit humain. De plus, les lois mathématiques contraignent la réalité physique à lui obéir, malgré leur nature totalement immatérielle. Aussi elles sont clairement quelque chose de supérieur à la matière.

Si les mathématiciens craignent de tomber dans un matérialisme mathématique, je suis d'accord avec eux. Mais l'idée que les mathématiques n'existeraient pas est tout simplement pousser le dogme matérialiste beaucoup trop loin. Heureusement, on ne peut se passer de mathématiques pour les applications techniques, aussi on n'a pas interdit les signes ostentatoires d'appartenance mathématiques à l'école ou en public, ni traité les mathématiciens de métaphysiciens ou de hippies. Ils sont tout de même bien encadrés idéologiquement, à preuve les sommes énormes englouties à des fumisteries comme «analyser» les cours de la bourse, alors que rien n'a été fait pour les logiques non-Aristotéliciennes (première partie) qui seraient pourtant infiniment plus utiles.

Généralisation à d'autres domaines immatériels

(Permalien) Pourquoi ce qui est valable (et reconnu) pour les mathématiques ne le serait-il pas pour d'autres domaines immatériels? Tentons une expérience: pour la démonstration de deux et deux font quatre, nous avons effectué une visualisation de deux, puis deux autres boules, ou toute autre «chose». Les comptant mentalement, nous avons pris conscience qu'il y en a quatre au total. C'est ainsi que les mathématiciens procèdent pour démontrer TOUS leurs théorèmes, des plus simples aux plus compliqués, avec des visualisations certes plus élaborées, mais toujours sans la moindre trace de preuve matérielle, qu'ils refusent totalement. C'est au fond encore plus direct et plus sûr que pour une expérience de physique, qui nécessite l'utilisation d'organes des sens, d'instruments et d'un matériel expérimental. Et si les mathématiciens s'aident d'accessoires tels que crayon et papier, ou des ordinateurs, c'est uniquement pour pallier aux limites de la mémoire humaine, ces objets n'ayant aucun rôle dans la méthode elle-même.

 

Et si cette méthode était applicable dans d'autres domaines immatériels? Posons nous par exemple une question d'un ordre tout à fait différent, spirituel: la conscience humaine existe t-elle? (Restons ici avec une définition très simple de l'esprit humain, comme étant la conscience, la capacité de se rendre compte de l'existence ou l'apparence d'un objet, ici notre propre conscience). Et employons la même méthode qu'avec les quatre boules. Tentons la manip: êtes vous conscients? Arrêtez de lire un instant, et regardez si vous êtes conscients...

...

...

... Vous avez vérifié? Si vous n'avez pas essayé, inutile de lire la suite, refermez ce bouquin et surtout n'ayez pas l'impudence de venir le critiquer. Si vous êtes un compte en banque, un programme génétique, ou un rouage administratif, il est normal que vous n'ayez rien vu, et que cette expérience n'ait aucune signification pour vous.

 

Mais tous les êtres humains qui ont tenté l'expérience sincèrement ont obtenu le même résultat: Nous sommes tous conscients. Nous observons le phénomène de la conscience quand nous réalisons que nous percevons quelque chose, image des sens, image mentale, idée, sentiment, ou la conscience elle-même. Observer un objet (extérieur ou mental) est certes un acte de conscience, mais quand je parle d'observer la conscience, c'est bien d'«être conscient que nous percevons un objet» qu'il s'agit: la conscience consciente d'elle même, et donc qui s'observe: la conscience est un objet observable au même titre qu'un objet matériel ou qu'un résultat mathématique. L'expérience est parfaitement reproductible et donne toujours le même résultat, aussi rigoureusement qu'une expérience de mécanique, aussi fidèlement qu'une démonstration mathématique. La conscience est une propriété de base de l'être humain. (Je ne vois d'ailleurs pas d'autre moyen de la définir scientifiquement qu'avec cette expérience. Toute définition du style «processus cognitif d'organisation des stimuli selon une analyse réflexive...» malgré le «vocabulaire scientifique» employé, n'est pas une définition de la conscience, ne permet pas de savoir ce que c'est, ni de l'appréhender dans sa totalité, et n'a donc aucune valeur scientifique. Cette définition ne permet même pas de différencier un être humain d'une console de jeu vidéo, elle aussi capable de «processus cognitif...»)

 

Pour être précis, alors que j'étais en train de réécrire cette page, j'ai demandé à plusieurs personnes de faire cette expérience, dans le cadre des discussions de mon groupe «shedrupling» dans Second Life. Nous nous rassemblions autour d'un feu (virtuel), au «Spiritual Living Center of SL», et je leur demandais d'observer le feu, puis de se rendre compte du fait qu'ils percevaient ce feu. Je me suis alors aperçu que, dans une première approche, la plupart des personnes donnent des réponses aussi variées que hors sujet. Certains s'étonnaient de n'avoir rien «vu», comme si il fallait s'attendre à voir quelque chose, un fantôme, une lumière, leur âme, Dieu, leurs influx nerveux... alors que la conscience n'a pas d'apparence. D'autres se demandaient si l'objet observé était réel, abstrait, virtuel, etc. Il est probable que ces incompréhensions soient en rapport avec le fond culturel des personnes. Par contre, une fois ces incompréhensions dissipées, tout le monde s'accordait pour dire qu'ils avaient bien observé leur conscience.

En fait l'expérience est très simple, si simple qu'on n'ose pas l'accepter, alors on va chercher des trucs et des machins «scientifiques» compliqués. En fait, cette constatation est tout simplement la première chose que nous faisons en nous réveillant le matin: «tiens, je suis réveillé», c'est-à-dire «je suis conscient». Présenté ainsi, les gens comprennent mieux. Je n'ai, jusqu'à présent, pas trouvé de personnes qui «rataient» vraiment l'expérience, bien que chacun la décrive avec une prodigieuse diversité d'images, de mots ou de concepts (chapitre I-9), mais se rapportant toujours à l'idée d'observer sa conscience, ou d'observer ses processus de pensée, de perception.

 

Bien sûr on peut aller plus loin, se demander ce qui est conscient, et comment, mais cela suffit pour le moment: nous avons trouvé une réalité non-matérielle qui existe, qui est observable, en s'y prenant exactement de la même manière que pour affirmer l'existence d'une réalité mathématique, c'est à dire de la même manière que pour affirmer l'existence d'une réalité matérielle, mais dans un autre domaine d'observation. On peut s'amuser à explorer les propriétés de cette conscience: elle perçoit des images, des sons, elle comprend des situations, a des idées, des désirs, des intentions, et teinte ces éléments de toute une variété de poésies, de tendresses ou de chagrins, tous éléments qui n'ont aucune base ni contrepartie matérielle, mais que nous observons à chaque instants. C'est là le domaine de l'esprit humain, avec ses réalités observables.

Observable comment? Pas avec un cyclotron, bien sûr. Observable par cet esprit humain lui-même. On pourrait objecter que si cet esprit humain ne peut être observé que par lui-même, alors notre raisonnement est vicieux. Mais la situation n'est pas vraiment différente de celle de la physique ou des mathématiques: mathématiciens et physiciens utilisent aussi leur conscience pour observer. Et ça n'empêche pas nos Nobels de faire des maths ni de la physique. Ils se servent d'instrument de mesure, répondra-t-on. C'est que l'instrument physique le plus sophistiqué est inutile si il n'y a pas un observateur qui s'en sert. Et il est encore inutile si cet observateur dort sur l'instrument! Ou si il refuse d'admettre ce qu'il voit! C'est bien de la conscience de l'observateur dont on a besoin. Que signifie «science»? Qu'une conscience sait. Que signifie «observer»? Qu'une conscience a une expérience de perception de la réalité. Même en physique, seule cette conscience est capable d'observer le monde physique, même si elle a besoin pour cela d'un dispositif dans ce monde physique (qui inclura forcément un organe des sens de l'observateur, et éventuellement un instrument d'observation pour accroître la puissance de cet organe). Idem en math, où les constructions conceptuelles les plus subtiles ne sont d'aucun secours si personne ne s'en crée une image mentale pour prendre conscience du résultat. La seule différence est qu'en maths, au lieu d'utiliser un appareillage physique, nous utilisons une construction conceptuelle. De ce fait, nous n'avons pas besoin d'organe des sens, car notre esprit est capable d'être directement conscient des constructions conceptuelles. Quant au domaine de l'esprit humain, exactement comme en mathématique, les personnes qui travaillent dans ce domaine utilisent différentes méthodes de visualisation et d'introspection pour voir ce qui s'y passe et pour obtenir les résultats qu'elles recherchent. Instrument scientifique physique, construction conceptuelle mathématique, visualisation de méditation ont, chacun dans leur monde, le même statut épistémologique et heuristique (note 2) de moyen pour que tel ou tel aspect de cette réalité devienne observable par la conscience.

 

Donc nous nous sentons maintenant le droit d'affirmer la réalité de cet esprit humain et de son monde, d'égal à égal avec les réalités mathématiques et physiques. Il est donc possible d'observer et d'explorer des réalités non matérielles, en plus de celles des mathématiques. Et c'est même très simple!

(En toute rigueur, on n'a à ce stade pas répondu à beaucoup de questions et d'objections, on a manqué de précision dans nos définitions, on n'a pas déterminé si la conscience était essentiellement différente de la matière ou si elle est réductible à elle. Mais il est inutile et prématuré d'aller plus loin pour le moment, dans cette discussion sur l'épistémologie. Nous verrons ces questions spirituelles dans la cinquième partie sur la conscience.)

 

Une erreur à ce stade serait en gros celle qui est commise par beaucoup d'adeptes du Nouvel Age, ou des mouvements naturistes et écologiques: de rejeter en bloc toute la science, on d'en prendre le contre-pied en tenant indistinctement pour vraie toute affirmation à allure «spirituelle» ou «écologique». Une telle attitude est une porte ouverte à tous les biais psychologiques: croire à ce à quoi on s'attache, sans preuve, considérer les scientifiques comme un clan ennemi ou antisocial, considérer comme fondamentalement mauvais la technique, la chimie, la médecine, la génétique, l'électricité, les mathématiques, l'écriture... Une telle erreur est fréquente, et il existe dans ces domaines des personnes qui ont des vues aussi dogmatiques que celles des rationalistes, parfois encore plus extrémistes et dangereuses. Ces personnes représentent une certaine puissance, du fait de leur audience, de la pertinence de leurs arguments, et surtout de la démission de la science dans ces domaines, qui y laisse ainsi le champ libre à n'importe quoi.

Donc pour éviter cette démarche naïve, il convient, non pas de simplement prendre le contre-pied de la science physique sur un plan uniquement d'idéologie ou de clan, mais bien de résoudre le problème à la base, en proposant une nouvelle science, une nouvelle épistémologie, qui soit capable d'apporter la rigueur de la démarche scientifique dans tous les domaines, matériels ou immatériels, pour nous permettre d'y découvrir la vérité avec toute les garanties que ce que l'on va y trouver soit libre de tout biais psychologique ou idéologique, libre de toute erreur et libre de toute croyance inutile, illusoire ou dangereuse.

 

 

Épistémologie Générale: II épistémologie

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