English English English

Lokouten        Chapitre 16       

 

Épilogue

 

 

Sur Terre, environ quatre heures après l'arrivée de la sphère noire, des astronomes amateurs virent soudain le satellite de Neptune, Triton, briller à une magnitude au-dessus de la normale. La nouvelle se répandit dans le monde entier en quelques minutes, grâce au réseau d'alerte des astronomes, et moins d'une demi-heure plus tard un télescope optique de grande ouverture pointait le satellite. Il apparut à son bord un fin croissant très brillant, comme si une source de lumière l'éclairait depuis derrière Neptune. Les anses des anneaux étaient également beaucoup plus brillantes que d'habitude.

Les médias répandirent immédiatement la nouvelle sur Internet, à des millions d'abonnés aux alertes astronomiques, et plusieurs grands télescopes optiques se mirent à observer le phénomène en continu, connectant leurs caméras sur le réseau en temps réel afin que tout le monde puisse l'observer. Un liseré de lumière magenta apparut soudain sur le bord du disque de Neptune qui faisait face à Triton, tandis que ce dernier prenait encore deux magnitudes d'éclat. Et plus d'un milliard de personnes virent en direct un globe de lumière blanche, gros comme la Terre, émerger de derrière la planète, si brillant qu'il était visible à l'oeil nu comme une étoile moyenne.

Ce qui se passa ensuite ne fut comprit que bien plus tard. On vit bien deux objets brillants. Le premier resta caché derrière Neptune, éclairant toujours par derrière Triton et les anneaux, puis s'éteignant brusquement une heure après, ne laissant plus que le spectacle habituel de Neptune et de ses satellites éclairés par le Soleil. L'autre objet, blanc et brillant, s'éloigna rapidement de Neptune et se mit à décroître en magnitude, devenant rapidement invisible à l'oeil. Mais les télescopes optiques purent le suivre pendant plus de deux ans, toujours diminuant et se déplaçant sur le fond d'étoiles, jusqu'à ce que sa luminosité fut trop faible pour le détecter par aucun moyen.

Bien entendu, les télescopes quantiques furent immédiatement braqués sur les deux objets, mais ces machines ne purent jamais rien détecter à leur emplacement. On comprit rapidement que les objets, observés par les télescopes optiques avec quatre heures de retard (temps de propagation de la lumière de Neptune à la Terre), étaient en fait déjà partis depuis longtemps quand on pointa les télescopes quantiques sur eux. On essaya pourtant d'extrapoler la position du second objet, dont la trajectoire était très régulière, afin de pointer un télescope quantique là où il se trouverait réellement au moment de l'observation. Peine perdue, on ne put jamais rien voir, et ces merveilleuses machines furent à cette occasion complètement prises en défaut. Il ne fut de toute façon plus jamais rien observé d'anormal, ni au télescope optique, ni au télescope quantique.

Les anneaux de Neptune ne montrèrent aucune déformation, et le mouvement de la planète ou de ses satellites ne montra aucune altération décelable. La conclusion scientifique était que la masse des deux objets était très faible, voire nulle.

Les nombreux spectres qui furent pris du second objet montraient tous quelque chose qui ressemblait à un rayonnement thermique similaire à celui du Soleil, mais sans la moindre trace d'aucune raie d'émission ou d'absorption qui eut permis d'identifier un quelconque matériau ou phénomène. La seule caractéristique remarquable était que les couleurs étaient équilibrées de manière à donner le blanc idéal pour l'oeil humain.

Par contre Steve Jason et l'équipe de Rolf Gensher comprirent immédiatement ce qui s'était passé. Il n'y avait qu'un seul objet, qui bien sûr n'était autre que le Mandala des Gardiens Cosmiques. Il était arrivé près de Neptune à une vitesse très supérieure à celle de la lumière, et s'était soudain arrêté juste derrière la planète, éclairant Triton de sa lumière. Il était resté ainsi une heure, le temps de leur première discussion. Puis il était reparti vers une autre destination, instantanément, sans trajet intermédiaire, disparaissant sur place aux yeux de n'importe quel observateur. Le premier objet lumineux vu par les télescopes optiques était bien sûr le Mandala, vu au moment où il était immobile derrière Neptune. Comme il faut plus de quatre heures pour la lumière arriver de Neptune, tout était observé après ce délai de quatre heures. Et effectivement les télescopes quantiques n'avaient rien pu voir, car au moment où ils furent braqués, le Mandala était déjà reparti depuis trois heures. Le second objet lumineux était aussi le Mandala, mais vu cette fois au moment où il approchait bien plus vite que la lumière. Par le jeu de la Relativité Einsteinienne, il semblait remonter le temps, paraissant s'éloigner de Neptune alors que l'on voyait en fait le film inversé de son approche. Et, là aussi, quand un télescope quantique était braqué sur cette lueur fantôme, il ne voyait rien, car l'objet réel était passé depuis longtemps. Seules les observations secrètes de Rolf montraient la réalité, car elles avaient été les seules faites par un télescope quantique au moment où le Mandala était réellement présent.

Le fait que le mandala se soit déplacé plus vite que la lumière montrait clairement sa nature non-physique, car bien sûr la Relativité interdit à tout objet matériel lié à cet univers de se déplacer à une telle vitesse. Toutefois il avait, le long de son trajet, émis de la lumière physique, qui, elle, s'était comporté de manière apparemment surprenante, montrant un temps inversé. Mais ce comportement était tout à fait en accord avec la Relativité! On se souvient en effet du paradoxe des premiers quasars découverts, dont les jets semblaient déjà se déplacer plus vite que la lumière, par simple effet de perspective relativiste. Or ces jets ne se déplacent qu'à une vitesse inférieure. Si ils avaient pu se déplacer plus vite, la relativité les aurait montrés se rapprochant du quasar. Ce paradoxe avait donné prise à la l'idée des tachyons remontant le temps. La Relativité interdit ces objets, mais le mandala, objet non-physique, s'était apparemment comporté comme un tachyon.

 

Steve et l'équipe de la KRG n'osèrent rien dire de tout cela, malgré l'envie qui les brûlait d'informer la communauté scientifique et les peuples du monde, et de leur montrer les enregistrements du Mandala qu'ils avaient fait avec leur télescope quantique de Lhassa. Peut-être auraient-ils dû le faire à ce moment; il n'était pas nécessaire pour cela de révéler ce qu'ils savaient du Mandala. De toute façon, si ce dernier avait manifesté physiquement sa nature lumineuse, c'était bien pour être vu. Qui plus est, en violant la limite de la vitesse de la lumière, il avait aussi clairement montré sa nature non-physique!

 

L'effervescence soulevée par les observations sur Triton et Neptune occulta quelque peu les observations de Ouarkatan. Mais dans les heures qui suivirent, les exosociologues notèrent une agitation soudaine. La guerre avait inexplicablement éclaté sur toute la planète à la fois, et plusieurs villes furent rapidement détruites. On vit même plusieurs explosions nucléaires. Puis tout sombra dans une confusion indéchiffrable depuis la Terre. Le seul fait sûr était que les cités impériales avaient été très rapidement détruites et pillées, et avec elles les temples scientistes, tous méthodiquement réduits à des tas de gravats. L'immense majorité des observateurs fut atterrée, voyant en cela une catastrophe planétaire, avec plus de quinze siècles de progrès scientifiques soudain réduits à néant, juste au moment où la planète allait découvrir la communication quantique. C'était comme si la Terre retombait soudainement de l'âge spatial à l'époque de Clovis. De fait les médias, les réseaux électriques et les moyens de transport furent très rapidement hors d'état de fonctionner, tandis que les habitants fuyaient les grandes villes où aucune nourriture n'arrivait plus, abandonnant leurs voitures en panne sèche le long des routes. Il y eut vingt à trente ans de disette et énormément de morts, chez tous ces gens incapables de cultiver la terre. Et ce retour au Moyen Âge ne semblait compensé par aucun bénéfice: l'esclavage était toujours là, des guerres et des frontières apparurent, et les destructions massives de l'environnement ne s'arrêtèrent que faute de moyens techniques pour continuer à les perpétrer. Plus tard, la situation se stabilisa; le pouvoir était passé à des membres influents de la caste des Citoyens, parfois à des militaires, qui contrôlaient chacun une zone de la planète. Le concept de pays était inconnu des Ouarkiens, et les frontières furent longtemps un sujet de disputes et de guerres. Peu de nature vierge restait, mais les zones les plus inhospitalières furent abandonnées, et de ce fait protégées.

Plus tard l'observation de Ouarkatan devait montrer l'apparition de nouvelles cités, de styles très différents selon les régions, et de nouveaux bâtiments de réunion publique jusqu'alors inconnus. Mais c'est là une toute autre histoire qui demanderait des siècles pour être racontée.

Seuls Steve et le petit groupe de la KRG comprirent que cette souffrance des habitants de Ouarkatan leur en évitait en fait une bien pire. Certes ce monde passerait encore plusieurs siècle, voire plusieurs millénaires, avant de retrouver son niveau scientifique, et qui sait combien de temps il faudrait pour que s'éveillent la spiritualité ou les droits de l'homme. Mais les plans déments de manipulation génétique étaient irrémédiablement perdus, sans un seul survivant pour seulement les comprendre. Ainsi les habitants de Ouarkatan étaient maintenant libres d'éveiller leur humanité et d'évoluer sans menace. Juste dommage que les Gardiens Cosmiques n'aient pas permis d'intervenir plus longuement, plus précisément; mais au fond c'était mieux ainsi.

 

Environ un an après ces événements, tout le monde vit l'objet lumineux de Neptune passer très près de la position de Dumria sur le fond du ciel. Les techniciens des faisceaux interstellaires firent le rapprochement avec les coupures qui avaient été observées un an plus tôt. Mais ils ne devinèrent pas encore la vérité. Shédroup Ling aurait encore pu passer inaperçue à ce moment, si un technicien subalterne n'avait pas soudain révélé au grand public que le télescope de Shédroup Ling avait suivi l'objet presque en continu depuis l'interruption des faisceaux jusqu'aux phénomènes neptuniens. La corrélation entre la trajectoire observée par le télescope quantique et l'observation en lumière visible était parfaite, et cette fois tout le monde du admettre que l'objet numéro deux s'était en réalité approché de la Terre à cinquante fois la vitesse de la Lumière, avait été observé en temps réel par le télescope quantique de Shédroup Ling, tandis que la lumière qu'il avait émise parvenait bien plus tard sur Terre, montrant le film de son approche à l'envers, inversé dans le temps et étalé sur deux ans au lieu d'une semaine. Puis l'objet numéro deux était devenu l'objet numéro un, qui s'était tenu immobile pendant une heure derrière Neptune, avant de s'éteindre brusquement sans laisser aucune trace.

 

Jusqu'à présent peu de gens avait osé critiquer ouvertement Shédroup Ling: son honnêteté et son utilité sociale la mettait hors d'atteinte de tout dénigrement public. Mais en réalité elle dérangeait beaucoup de monde, de par son objet épistémologique même, qui donnait du cœur à la science, et surtout par ses travaux de dénonciation des manipulations mentales. En principe ces dénonciations visaient les sectes et les dictatures, mais il était vite devenu beaucoup trop apparent que, en fait, tout le monde manipulait depuis longtemps, y compris nombre de politiciens ou de médias qui se disaient pourtant démocrates. Beaucoup de scientistes et de politiciens lui en voulaient aussi en secret d'avoir mis à jour l'incroyable «conspiration anti-suicide» quelques années plus tôt. Ces scientistes étaient en fait de l'avis de la conspiration, même si ils ne pouvaient la soutenir ouvertement à cause des méthodes terroristes qu'elle avait utilisées sur Dumria. Aussi il ne faut pas s'étonner si la révélation des observations secrètes, au fond bien anodine, fut rapidement montée en un véritable scandale, avant même que quiconque ait pris le temps de demander aux responsables de Shédroup Ling pourquoi ils n'avaient pas publié ces observations.

On ne voit que trop souvent les honnêtes gens couverts d'éloges hypocrites, puis du jour au lendemain lynchés et jetés plus bas que terre, pour une peccadille qu'on ne leur pardonnera jamais: l'honnêteté et la probité dérangent tant les magouilles et les sales caractères que la moindre faute est immédiatement utilisée pour casser leur image. La rage de dénigrer est alors d'autant plus forte que la victime était tenue en plus grande fausse estime.

La cabale fit rage pendant plus d'un mois, pendant lesquels des choses incroyables furent proférées. On entendit des harangues anti-Shédroup Ling jusqu'à la tribune de l'ONU, parlant de confisquer voire d'interdire l'université internationale. Le fait que l'Université était internationale fut également un grand sujet de hargne, même si ses fondateurs n'avaient eu aucune visée contre quelque pays que ce soit.

Les dirigeants de Shédroup Ling se gardèrent bien de tout commentaire, se contentant de donner leur version des faits, où manquait juste ce qui n'avait pas à être révélé au public. Heureusement rien ne transpira jamais à propos des Gardiens, des Lokouten, ni de l'intervention sur Ouarkatan, connus seulement d'une vingtaine de personnes de toute confiance.

Les Dumriens furent également soumis à des pressions considérables, leur enjoignant de révéler «les secrets de Shédroup Ling». Les exosociologues de l'équipe d'Ezran répondirent qu'ils ne savaient pas de quoi il s'agissait, ce qui était vrai. Ce jeu ne leur plaisait pas du tout, et ils firent clairement savoir que cela leur rappelait les heures sombres de la «conspiration anti-suicide»: les terriens réglant leurs comptes par Dumriens interposés. Heureusement ils avaient le soutient sans faille des exosociologues terriens qui refusèrent comme une grave folie de demander aux Dumriens d'arbitrer une querelle entre Terriens.

Puis faute de véritables arguments, la lapidation médiatique finit par se tarir. Il y avait une coupe du monde de football pour occuper les médias. Les dons d'argent en soutient à l'université Shédroup Ling n'avaient même pas faibli, les étudiants n'avaient jamais été aussi nombreux dans les différents centres d'étude du monde, et on ouvrait de nouveaux centres d'enseignement en Argentine, en Afrique, en Chine. La nouvelle science consciente s'offrait gratuitement à tous les pays pauvres que l'ancienne science matérialiste avait laissés à l'abandon.

 

Toutefois l'alerte avait été chaude. On ne leur laisserait plus rien passer désormais. Rolf Gensher et les principaux directeurs de centres ou conseillers se réunirent, et, afin de ne plus prendre le risque de voir l'Université confisquée ou détruite d'un seul bloc à l'occasion d'une nouvelle cabale ou campagne de calomnies, ils prirent la décision de «dissoudre» Shédroup Ling. Plus exactement ils la séparèrent en plusieurs organisations nationales plus petites et juridiquement indépendantes, quoique toujours liées par les mêmes connaissances et les mêmes méthodes. Il n'existait plus aucune structure formelle au niveau international, ce qui supprimait nombre d'arguments contre l'Université. Mais, Shédroup Ling, loin de s'être suicidée, s'était en fait immortalisée, en continuant à exister à la façon dumrienne, sans statut juridique ni structure à détourner ou à interdire, mais par un puissant réseau d'amitiés, de connaissances et de pensée commune. De toutes façons elle avait rempli le rôle pour lequel elle avait été imaginée: l'Épistémologie Générale était maintenant reconnue et étudiée dans le monde. Sa pérennité était assurée dans presque tous les pays par de nombreux professeurs, et par tous les laboratoires, sociétés et gouvernements qui la mettaient en oeuvre pour résoudre leurs problèmes sociaux et moraux. Ses propositions d'éthique scientifique étaient largement reprises par l'ONU, les ONG de défense des droits de l'homme, et approuvées par les principaux chefs religieux. Sa science spirituelle avait permis d'interdire plusieurs grandes sectes. Ses découvertes agronomiques bouleversaient l'agriculture des pays pauvres d'Amérique, d'Afrique et d'Asie; ses découvertes spirituelles donnaient un sens à la vie dans les pays riches, tandis que ses propositions économiques offraient enfin des moyens de mettre un terme à cette honteuse ségrégation par l'argent. Ainsi plusieurs universités autonomes furent créées dans le monde, dans tous les pays, sous divers noms. Le centre historique de Lhassa et ses annexes tibétaines fut réorganisé en deux nouvelles institutions: le Peushoung Shérab Tsokpa, Centre D'étude Gouvernemental, pour la physique et l'astronomie, et la seconde sous forme d'une institution privée sous le patronage de plusieurs maîtres religieux: le Dékii Peljor Lékhor, ou Cercle d'Activité pour le Bonheur et l'Abondance, regroupant l'agronomie, l'éthique et la spiritualité, vite célèbre sous le sigle tibétain de Dépélé. Les documents officiels réglant la dissolution ne mentionnaient même pas le laboratoire de psychophysique. Mais Rolf Gensher conserva sous sa direction personnelle les ingénieurs de l'unité de psychophysique de Palomas en Californie, auxquels il joignit le personnel et les connaissances de l'ex laboratoire de Lhassa. Cette unité, sensée s'occuper d'épistémologie, prit le nom officiel de PEC, Epistemological Centre of Palomas, bien que le nom de Shédroup Ling lui fut encore appliqué vingt ans après. Ce n'était que justice, car c'était bien là le cœur de l'ancienne Shédroup Ling.

C'était une énorme perte de pouvoir pour Rolf Gensher, mais il n'en avait cure: c'était l'accomplissement définitif du but qu'il s'était lui-même donné des années auparavant: sans pouvoir central, personne ne pouvait plus dominer ou détourner Shédroup Ling en entier! L'épistémologie Générale était maintenant indestructible, libérée de tout carcan institutionnel!

Quant aux activités psychophysiques elles-mêmes, il s'agissait surtout d'enseignement, car Rolf savait maintenant qu'au delà d'un certain point les recherches et les applications doivent devenir confidentielles. Aussi le PEC fut surtout un centre privé d'enseignement et d'entraînement pour des personnes qui montraient des prédispositions dans ce domaine. Toutefois on peut penser qu'un tel rassemblement de personnes spécialement douées était utilisé pour de la recherche, sans parler de quelques discrets mais fort jolis coups politiques... Le PEC disparut du regard public, dans des villas isolées et anodines des Montagnes rocheuses, Utah, Idaho, Oregon, et bien sûr Tibet, où il faisait bon vivre et travailler entre personnes psycho-éduquées. Il ne devait pas ressurgir avant un siècle, quand furent démarrés les premiers préparatifs officiels de la Transition spirituelle. Mais les observateurs devaient remarquer que, curieusement, les gouvernements reconnurent immédiatement le PEC comme l'autorité incontestée dans ce domaine.

 

Les Dumriens, de leur côté, quelque peu estomaqués par la rapidité des bouleversements qui avaient eu lieu sur Terre, prirent le parti de garder l'appellation Shédroup Ling et l'autorité suprême de Rolf Gensher. Pour eux, couper leur organisation en plusieurs parties n'avait pas de sens, puisque ni les parties ni l'ensemble n'avaient aucune définition juridique. C'était aussi un moyen de rappeler à certains terriens que Dumria était leur planète, et qu'ils entendaient bien rester maîtres de leur destin, sans se soucier des viviscitudes des conflits terriens. Ainsi Ils continuaient à fonctionner comme ils l'avaient l'habitude, en groupes de jeu, qui se débrouillaient seuls ou s'offraient mutuellement de l'aide selon les besoins. Tant qu'ils n'étaient pas autonomes vis à vis de la Terre, il leur fallait absolument garder la cohérence interne de l'enseignement de l'Épistémologie Générale, et donc garder une direction terrienne. Mais ils pourraient bientôt assurer eux-mêmes cette cohérence, et se passer de toute interférence terrienne.

Sangyé Tcheugyal n'avait aucun rôle officiel dans la nouvelle organisation de Rolf, mais il y intervint encore quelques fois comme conseiller ou chercheur officieux, avant de rentrer définitivement en retraite quelques années plus tard, dans son nid d'aigle d'ermitage au Nord de Lhassa, ou il ne reçut plus que quelques proches disciples, dont Kurt, Niels et Ulrike. Yonten Dreulma, de son côté, se fit emmurer dans un discret petit centre de retraite dépendant de Kouroukoulla Gompa. Un an plus tard, lorsque l'acolyte constata qu'elle ne prenait plus sa nourriture, Guéshé Kyoungpo La vint ouvrir la cellule: il ne restait plus rien d'autre sur Terre de Yonten Dreulma que ses vêtements.

Steve Jason se vit officiellement accorder un poste de professeur à Palomas (Californie), non loin du PEC. C'est à cette occasion qu'il quitta définitivement le Tibet. «L'impermanence» fit-il en riant à l'adresse de Tcheugyal, en montant dans l'avion à l'aéroport de Lhassa. Mais, comme tous ceux qui y ont vécu, il garda toujours une profonde nostalgie du Pays des Neiges.

Lokouten        Chapitre 16       

 

 

 

 

 

 

Scénario, dessins, couleurs, réalisation: Richard Trigaux (Sauf indication contraire).

 

 

 

Comme tous les auteurs indépendants, j'ai besoin de votre soutient pour que je puisse continuer à travailler à ce site et que puisse exister une expression libre sur le net:

 

 

 

Notice légale et copyright. Sauf indication contraire (signe © dans la barre de navigation) ou exception légale (pastiches, exemples, citations...), tous les textes, dessins, personnages, noms, animations, sons, mélodies, programmations, curseurs, symboles de ce site sont copyright de leur auteur et propriétaire, Richard Trigaux. Merci de ne pas faire un miroir de ce site, sauf si il disparaît. Merci de ne pas copier le contenu de ce site, sauf pour usage privé, citations, échantillons, ou pour faire un lien. Les liens bienveillants sont bienvenus. Tout usage commercial interdit. Si vous désirez en faire un usage commercial sérieux, contactez-moi. Toute utilisation, modification, détournement d'éléments de ce site ou des mondes présentés de maniére à déprécier mon travail, ma philosophie ou les régles morales généralement admises, pourra entraîner des poursuites judiciaires.